Yasmine Fidimalala expose “Des racines et des ailes” au Tamboho Boutik Hotel

3 Dec 2018

« Fakamidina Mananelatra » traduit en français par « Des racines et des ailes », tel est le concept de l’exposition de Yasmine Fidimalala, artiste peintre qui expose du 1er décembre 2018 au 30 janvier 2019 au Tamboho Hotel à Ambodivona. Rencontre avec l’article !

Yasmine, d’où vous est venue l’idée de ce concept de « Des racines et des ailes » ?

Plusieurs explications pourraient être extrapolées de ce thème comme « Donnez à vos enfants des ailes pour s’envoler et des racines pour revenir », c’est à dire que le rôle d’un parent serait de préparer son enfant à être indépendant, plus tard, surtout quand l’enfant en question est une fille. C’est aussi dans mon concept en tant que femme (…) la vie est un combat et il faut apprendre à nos filles à être des guerrières et non des Princesses … ou sinon des Princesses guerrières. Des racines pour revenir, car dans la vie peu importe où on vas, les racines reste toujours la maison, le foyer familial.
Je suis aussi pour le concept #Taninjanaka que je partage avec quelques autres artistes déjà. Un concept qui dicte que c’est nous, maintenant, qui préparons l’avenir de nos descendants, que ce soit par rapport à notre idéologie de la vie, du civisme, du respect de l’environnement et bien d’autres encore… Qu’est-ce que nous laisserons pour la génération future, pour les enfants de Madagascar ? Quel avenir allons-nous les réserver ?

D’ailleurs, c’est aussi l’une des raisons principales qui me poussent à travailler avec des organismes non gouvernementaux ou encore des associations qui œuvrent pour la protection des droits des enfants, notamment les enfants démunis d’Antananarivo.

Pouvez-vous expliquer davantage, car il s’agit tout de même d’un concept hors du commun, mais dont l’idée générale réside sur les fondements de notre culture ancestrale qu’est le « Fahendrena » ?

Effectivement, un proverbe malagasy dit : « Ny hazo no vanonkolakana, ny tany naniriany no tsara » qui se marie parfaitement avec ce que je viens d’affirmer un peu plus haut. Car, les sacrifices, en tant que mère célibataire et non moins femme artiste, reviennent à mon concept qu’est « Fakamidina ». C’est ma façon de m’exprimer et de présenter au monde, mon environnement comme quoi, dans la vie, quand on est passionnée parce qu’ on fait et malgré les obstacles et les refus ainsi que les coups durs de la vie, il ne faut jamais renoncer, au contraire il faut carrément transformer les obstacles en quelques choses de positives. Quand ces sacrifices aboutissent à quelque chose de positif, c’est comme si l’on se sentait poussé des ailes pour s’envoler librement après.

Et pourquoi avoir choisi Tamboho Boutik Hotel pour une exposition de 2 mois à Antananarivo ?

Tout d’abord, le « Tamboho » en soi, émane aussi pour moi, un symbole très fort, car ce sont des murs que nos ancêtres ont construit avec une recette bien spéciale (…) et malgré les années, ces « Tamboho » restent toujours debout, malgré les intempéries et les moisissures et le reste. J’adore leurs craquelures et leurs couleurs typiques de terre rouge, en symbolisme dans mes tableaux.

Il y a cette question « pourquoi notre culture n’est-elle pas comme les Tamboho? » Des survivants en fait, et pourquoi ils sont bien encore là, le fait de collaborer avec l’hôtel Tamboho Boutik a donc déjà un sens très fort pour moi, car ils programment depuis cette année des expositions pour mettre en valeur les artistes Malagasy.

Effectivement, une femme qui fait de la peinture n’est pas commune et les artistes choisis par Tamboho Boutik sont tous des artistes de renoms. Comment expliquez-vous cela ?

J’ai appris plusieurs techniques autour de ces 20 années de vie d’artistes, depuis mes débuts en 1998 jusqu’à maintenant. J’ai commencé par le dessin, les craies d’art, en passant par l’aquarelle , l’acrylique, mais ce qui me séduit le plus maintenant c’est la peinture à l’huile sur toile. Cette technique exprime en profondeur mes couleurs, mes expressions. J’ai envie que mes œuvres me survivent, même 100 ans après ma mort. Cette technique est, si l’on peut le dire ainsi, celle des grands maitres d’art de la peinture. Par ailleurs, je fais aussi de la sculpture sur bois normaux ou bois vieillis. J’aime les choses qui ont du vécu comme des histoires à raconter, « les vintages » comme on dit maintenant. Je m’inspire aussi des vécus des gens, du pourquoi de leurs cheveux blancs, des rides sur leurs visages causées supposons parce qu’un père s’est soucié de son fils malade ou une étape difficile dans la vie, des personnes que j’appelle des survivants et qui continuent de croire à la vie, à l’avenir et gardent leurs sourires. Un peu comme les enfants des quartiers démunis de chez nous, là où je travaille auprès des ONG. Leurs histoires sont dramatiques, pourtant ils sont reconnaissants. Je m’inspire beaucoup de ces moments, un peu comme notre pays qui, malgré sa beauté, porte des plaies intérieures.

Propos recueillis par Faly R.