Secteur privé : pour une stratégie de sortie de crise et de relance de l’économie

16 Aug 2021

Cri de détresse du secteur privé. Selon une enquête réalisée en avril 2021 auprès du secteur privé, près de 80% des entreprises ont constaté une détérioration du climat des affaires au cours des deux dernières années 2019-2020. Par ailleurs, moins de 50% des entreprises sont optimistes pour 2021 et plus de 60% d’entre elles n’envisagent pas ou plus d’investir au cours de cette année, en raison du contexte socio-économique.

Dans une lettre ouverte adressé au Président de la République, les groupements et syndicats professionnels du secteur privé formel à Madagascar partagent leur inquiétude face à la situation économique actuelle.

« Le secteur privé est parfaitement conscient du caractère exceptionnel de cette crise sanitaire mondiale que nous vivons et des efforts continus du Gouvernement pour préserver la population. Cependant l’absence de visibilité et de stratégie claire de sortie de crise pénalisent dramatiquement l’ensemble de l’économie et pèsent sur les emplois. Tous les secteurs économiques souffrent, quand certains sont à genoux, à travers tout le pays non seulement dans la capitale mais aussi dans les régions productives ou touristiques », soulignent-ils.

Le secteur privé dresse un bilan « dramatique » après 16 mois de crise. En effet, malgré les efforts entrepris par les entreprises et en l’absence de subventions comme celles octroyées dans d’autres pays, les activités et les revenus du secteur privé ont baissé de 44% en moyenne par rapport à l’année 2019, allant jusqu’à 90% dans l’industrie du voyage, indique-t-on. En outre, nombreux sont les employeurs qui n’ont eu d’autre choix que de procéder à des licenciements économiques ou des mises en chômage technique. Selon la Banque Mondiale, ce sont près de 1,4 million de personnes qui ont basculé dans l’extrême pauvreté en 2020 en raison des pertes d’emplois dans les secteurs clés de l’industrie et des services.

D’après les groupements et syndicats professionnels du secteur privé formel à Madagascar, la fermeture des frontières du pays depuis presque un an et demi impacte l’ensemble des échanges économiques qu’ils ont mis plus d’une décennie à consolider. « Les plus touchés sont les exports et l’industrie du voyage, laquelle ne concerne pas seulement les établissements touristiques mais également tout le secteur des transports, les filières d’approvisionnement et les services associés. Le secteur du tourisme à lui seul enregistre un manque à gagner de plus de 800 millions d’Euros sur 12 mois tandis qu’en moyenne les activités n’y tournent qu’entre 10 et 20% de leur capacité. Madagascar est l’un des pays ayant enregistré la plus grande baisse de voyageurs internationaux (-93%), fragilisant directement 300 000 emplois et autant de ménages vivant du tourisme et des transports. Cette fermeture prolongée et drastique des frontières pose également la question du droit fondamental des personnes Malagasy à pouvoir rejoindre leur pays, leur famille et leur entreprise », lancent-ils.

Parallèlement aux baisses de revenus, les charges obligatoires des entreprises à date s’alourdissent entre le cumul des impôts et taxes, des remboursements de crédit contractés pour faire face à la crise, des charges sociales et des dettes de fournisseurs. « La trésorerie de nos entreprises n’est malheureusement pas infinie, et nombreuses sont celles en défaut de paiement entraînant un lourd impact financier sur l’ensemble de la chaîne de valeur. Même les fonds qui nous permettraient d’assurer un redémarrage de nos activités restent aujourd’hui un point d’interrogation. A titre d’exemple, nous attirons l’attention sur le fait que les entreprises du BTP attendent toujours la régularisation des impayés de l’Etat qui s’élèvent à 60 Milliards d’Ariary », déclare le secteur privé.

Pour les groupements et syndicats professionnels du secteur privé formel à Madagascar, l’heure économique est grave. C’est ainsi qu’ils plaident pour la mise en place effective d’une stratégie de sortie de crise à l’instar de ce que la plupart des pays ont mis en place à travers le monde, et sollicitent un Dialogue Public-Privé avec le Président de la République le plutôt possible pour s’assurer ensemble que ladite stratégie s’accorde avec les réalités économiques et sociales du pays. « Notre économie a besoin de visibilité et d’un calendrier pour que les entreprises et les employeurs puissent se projeter et reprendre leurs activités et leurs investissements, gages d’un développement durable », soulignent-ils. Eux de préciser que cette stratégie soit être proactive et non réactive. De plus, elle devrait comprendre des jalons clairs dont une projection ambitieuse de vaccination, un calendrier courageux de réouverture des frontières, un engagement ferme de paiement des arriérés des entreprises, ainsi que des mesures réelles et concrètes de soutien au secteur privé. Nous savons que nombreux sont les Partenaires Techniques et Financiers prêts à soutenir ces mesures si elles sont prises.

 

Lanja R.