Le couvre-feu constitue la première raison de la privation d’emploi

9 Jul 2020

Outre le changement dans le quotidien de la population, les mesures prises par l’Etat afin d’endiguer la propagation du coronavirus ne sont pas sans conséquence sur l’économie.

Dans l’immédiat, la conjoncture économique du pays est mise à rude épreuve. Les impacts de cette crise sanitaire sur la sphère économique se ressentent inéluctablement sur l’emploi et le revenu des ménages. Qu’il s’agisse de zones rurales ou urbaines, confinées ou non, les impacts de la Covid- 19 sur l’emploi touchent l’ensemble du territoire national en cette période. La branche Agriculture semble relativement épargnée tandis que la Restauration – Hébergement puis le Transport sont les plus pénalisés par la pandémie de Covid- 19, selon les résultats de l’enquête à haute fréquence par téléphone auprès des ménages (EHTM).

Le ralentissement des activités productives, suite logique des mesures inhérentes à l’état d’urgence sanitaire décrété sur l’étendue du territoire national, débouche sur une contraction de la production et donc de l’emploi. Cette stratégie semble être défavorable aux activités productives jugées non essentielles en ces temps de crise sanitaire.

Au total, 10,1% des ménages accusent une perte d’emploi depuis la période de confinement. Cela représente une perte totale 7,7% sur l’ensemble des emplois. Quatre branches d’activités économiques sont principalement touchées par ce fléau. Il s’agit des emplois dans la Restauration et de l’Hébergement (61%), le Transport (38%) dans la Transformation et la Fabrication (13,8%) et puis dans le Commerce (12,8%).

Notons les emplois de l’Administration publique au même titre que ceux de l’Education n’échappent pas non plus aux impacts de la pandémie. En outre, le tourisme au même titre que les services personnels aux ménages, deux branches à cheval entre ces activités économiques, sont tous les deux frappés de plein fouet par cette pandémie.

Les milieux urbains confinés en proie à une perte d’emploi.

Toujours d’après les résultats de l’enquête haute fréquence par téléphone auprès des ménages,  l’instauration de l’état d’urgence sanitaire et ses corollaires ont ralenti les activités de productions sur l’ensemble du territoire national. Toutefois, les effets sont différents selon les milieux. Ainsi, la perte d’emplois est plus importante dans les zones urbaines confinées contrairement aux zones rurales. Ce constat confirme le fait que l’Agriculture soit relativement épargnée par les effets de la pandémie de la Covid-19 sur l’Emploi.

Le couvre-feu et l’arrêt des activités des entreprises ou de l’Administration sont les causes principales de l’arrêt des activités productives. Sur l’ensemble des emplois en arrêt à cause de la pandémie, le couvre-feu en vigueur sur l’ensemble du territoire national constitue la première raison de la privation d’emploi. Les activités nocturnes tiennent pour ainsi dire une place importante sur le tissu économique à Madagascar. Il s’agit des emplois frappés par les restrictions comme le transport des marchandises durant la nuit, les services aux ménages comme le gardiennage, les emplois liés à l’hôtellerie et la restauration, les activités nocturnes des boulangeries, etc. Bien entendu, l’arrêt des activités entrepreneuriales et de la machine administrative font que l’activité économique soit au ralenti. La restriction des déplacements entre les régions a freiné la mobilité des travailleurs et induit inévitablement un effet néfaste sur l’emploi.

A noter que les emplois du secteur formel sont les plus exposés face à la pandémie du Covid-19. Globalement, les emplois du secteur formel sont les plus touchés par cette crise sanitaire. En effet, cette perte est de l’ordre de 4,4% pour les emplois du secteur informel contre 12,9% pour ceux du formel, ces derniers étant plus respectueux des mesures gouvernementales en vigueur pour lutter contre le coronavirus. Ils se plient plus aux restrictions contrairement aux emplois du secteur informel. Plus spécifiquement, les travailleurs salariés, aussi bien du secteur formel qu’informel ont été les plus touchés par la perte d’emploi, après les apprentis du secteur informel.

Un sentiment d’incertitude sur le possible retour à l’emploi

Parmi les travailleurs se trouvant dans l’impossibilité d’exercer leur emploi, une incertitude entoure leur prévision quant à la possibilité de retourner à leur ancienne activité. En effet, la majorité d’entre eux ne sait pas s’ils pourront revenir à leur emploi. Cela s’apparente à une crainte de suppression d’emploi. Néanmoins, 29,7% de ces travailleurs pensent qu’ils peuvent revenir à leur occupation une fois que les mesures de restriction seront levées.

En outre, en dépit du travail effectué, 4 emplois sur 10 se font sans aucune rémunération lors de la période de confinement. Globalement, cela s’explique par la réduction du temps de travail. Ainsi, plus de 6 travailleurs sur 10 veulent effectuer des heures supplémentaires dans le cadre de leur profession ; le temps de travail étant écourté.

Une diminution du revenu des ménages

D’une manière générale, la contraction des activités économiques lors de la crise sanitaire se traduit par une diminution des revenus des ménages. En considérant la totalité des sources disponibles, 64,4% des ménages ont accusé une diminution des revenus. Bien que les emplois de l’Agriculture soient relativement préservés, les revenus de ces derniers sont pénalisés par la pandémie de Covid-19 au même titre que ceux des entreprises familiales non agricoles. Globalement, l’environnement des affaires n’est pas propice aux investissements.

Mesurer l’impact de la Covid-19 sur les conditions de vie des ménages

L’enquête à haute fréquence par téléphone auprès des ménages (EHTM) est menée par l’Institut National de la Statistique (INSTAT) pour mesurer les l’impact de la Covid-19 sur les conditions de vie des ménages à Madagascar. Il s’agit de soutenir l’effort du gouvernement dans la mise en œuvre du plan national de réponse sociale et de relance économique contre la Covid-19 pour assister les ménages et les entreprises en difficulté pendant cette période.

L’enquête ménage à haute fréquence est conduite et renouvelée chaque mois jusqu’à la fin de l’année. Elle est mise en place selon l’approche CATI ou l’enquête par téléphone assistée par ordinateur afin de respecter les mesures barrières et la distanciation sociale en ce moment. Le suivi s’effectue par enquête longitudinale d’un même échantillon de 1 240 ménages répartis dans tout le pays. La collecte des données de cette première vague a commencé en début du mois de juin 2020 et s’est terminée mi-juin 2020.

 

Lanja Ramiah