La pauvreté multidimensionnelle touche 2 enfants sur 3 à Madagascar

4 Nov 2020

Selon les résultats d’une analyse faite par le gouvernement de Madagascar en collaboration avec l’Unicef Madagascar, la pauvreté multidimensionnelle touche 2 enfants sur 3 à Madagascar.

Plus de deux enfants sur trois (67,6%) souffrent de privations matérielles dans au moins deux dimensions différentes de bien-être à Madagascar, tandis que 23,7% des enfants sont en situation de pauvreté extrême (4+ dimensions de bien-être).

Le taux de pauvreté extrême est plus de deux fois plus élevé en milieu rural (27%) qu’en milieu urbain (13%). Le Sud-Ouest du pays est le plus gravement affecté : près d’un enfant sur deux vit dans l’extrême pauvreté dans les régions d’Atsimo Andrefana (49,3%) et Ihorombe (49,1%).

Par ailleurs, les enfants cumulant plusieurs facteurs de vulnérabilité sont particulièrement susceptibles d’être pauvres. A titre d’exemple, l’analyse montre que le taux de pauvreté extrême est presque 7 fois plus élevé chez les enfants vivant dans des ménages dirigés par des femmes sans éducation et non-chrétiennes en milieu rural (53,4%), que chez les enfants ne présentant aucune de ces caractéristiques (7,4%).

Il existe des poches de privations sévères se cachant au sein de ménages non-pauvres. L’analyse des privations multiples des enfants à Madagascar montre que les enfants confiés et les doubles orphelins sont particulièrement susceptibles de souffrir de plus de privations que d’autres enfants du même ménage. En particulier, ces enfants sont deux fois plus susceptibles que la moyenne de subir des violences sexuelles. Les enfants handicapés tendent également à avoir plus de privations que d’autres membres du ménage, surtout dans le domaine de la nutrition, de l’éducation et des vaccinations.

Selon toujours les résultats de cette analyse, les garçons tendent à avoir beaucoup plus de privations que les filles dans le domaine de l’éducation. Ceci pourrait, en partie, s’expliquer par le fait que les garçons sont plus susceptibles que les filles de travailler. Les garçons sont également plus susceptibles d’être victimes de discipline violente. Par contre, les filles sont plus susceptibles d’avoir à faire la corvée d’eau.

En outre, l’éducation des parents, surtout de la mère, est fortement associée avec une réduction des privations chez les enfants, même après avoir pris en compte que les parents plus éduqués tendent à être plus riches, plus urbains, et plus âgés que la moyenne. Cependant, au-delà du niveau primaire, d’autres pressions sociales et économiques rentrent en jeu, qui peut négativement affecter le bien-être de certains enfants (non-allaitement, violences, etc.).

Les résultats de l’analyse des privations multiples des enfants qui ont été présentés  hier vont servir de ligne de référence pour le suivi de l’indicateur sur la pauvreté multidimensionnelle des enfants.

Madagascar pourra, pour la première fois, prioriser les plus pauvres dans les interventions programmatiques.

L’étude a été réalisée depuis le mois de janvier à travers les données de l’Enquête nationale sur la situation socio-démographique des ménages (MICS-6) de Madagascar, en collaboration avec le Ministère de l’Economie et Finances, l’Institut National de Statistique et Oxford Policy Management. Dans cette analyse, les privations matérielles et le bien-être des enfants en général ont été évalués. Les dimensions de la pauvreté considérées sont : la santé, la nutrition, l’éducation, l’eau et l’assainissement, l’habitat et la communication. Un enfant est dit multidimensionnellement pauvre s’il souffre de privations matérielles dans au moins deux dimensions.

Notons qu’avec la crise sanitaire due à la Covid-19, la pauvreté s’est probablement accrue tant au niveau des ménages qu’au niveau des enfants – 1,3 million d’enfants supplémentaires risquent de tomber dans la pauvreté d’ici la fin de l’année selon des simulations préliminaires de l’Unicef. « Nous pensons qu’une information précise et actualisée sur les indicateurs de développement est la première étape de toute stratégie réussie, et donc l’objectif essentiel de ce rapport d’analyse », explique Michel Saint-Lot, représentant de l’Unicef à Madagascar qui rajoute que l’Unicef est pleinement engagé dans cette tâche et désireuse de continuer à travailler aux côtés de ses partenaires nationaux et internationaux.

« A chaque fois que les opportunités vont se présenter, le gouvernement malagasy ne manquera pas de mettre à jour les indicateurs élaborés sur la base d’une analyse multidimensionnelle de la pauvreté à partir des grandes enquêtes nationales afin de disposer de données pour le suivi des progrès vers l’atteinte de l’ODD 1, relatif à la pauvreté sous différentes formes, et notamment celle des enfants », explique Romalahy Isaora Zefania, Directeur Général de l’INSTAT.

A quelques jours de la célébration des 30 ans de la signature de la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant par Madagascar, cette étude est encore plus importante pour mettre les enfants – qui représentent 50 % de la population – au centre des politiques de développement.

Lanja R.