Andry Rajoelina – Des chocs considérables sont venus perturber la politique de lutte contre la pauvreté

13 Jun 2023

Dans un entretien exclusif accordé à l’envoyé spécial de L’Express.fr à Madagascar, Paul Véronique, le Président de la République, Andry Rajoelina, dresse un bilan plutôt satisfaisant de son mandat.

Il a indiqué que son principal objectif durant ces quatre années à la tête du pays a été de rattraper le retard de développement de Madagascar. « Dès le début, j’ai voulu renforcer la présence de l’Etat dans le pays, à travers la construction d’infrastructures dont les populations ont un besoin urgent. L’un des projets consistait par exemple à construire 28 hôpitaux: 13 ont été finalisés, 15 sont reliant le grand port de Toamasina à Madagascar à notre capitale. Et relancer celle d’un pipeline pour approvisionner en eau le sud du pays, qui subit aujourd’hui des famines liées au changement climatique », avance-t-il.

Le Chef de l’Etat malgache souligne que le pays a été confronté ces dernières années à plusieurs chocs considérables qui sont venus perturber la politique de lutte contre la pauvreté, notamment la guerre en Ukraine qui a eu des répercussions importantes sur l’économie et qui s’est traduite par une forte hausse du prix de l’énergie et des denrées alimentaires. Le secteur touristique, un axe majeur de développement pour Madagascar, a en outre été mis à mal par la pandémie de Covid-19 et certains grands contrats et projets de construction d’hôtels n’ont pas pu se concrétiser, regrette le Président Andry Rajoelina.

Questionné sur son éventuelle candidature à la prochaine élection présidentielle, le Chef de l’Etat avance que pour le moment, il entend s’assurer que les projets d’infrastructures seront rapidement opérationnels. Il indique vouloir annoncer sa décision à la population malgache en temps voulu.

Questionné sur la préoccupation des ambassades occidentales suite à la décision du gouvernement d’interdire les réunions politiques dans les lieux publics, le Président Andry Rajoelina dit être dans l’incompréhension et en a donc discuté avec ces ambassadeurs occidentaux. « Sur le fond, le communiqué de ces diplomates avait des airs d’ingérence. Jamais notre ambassadeur à Paris n’a, par exemple, fait de communiqué pour juger des mesures décidées par le président français ou son gouvernement! Et il en va de même dans les autres pays. En réalité, Madagascar est sur la bonne voie en matière de démocratie. D’ailleurs, nous avons été classés 11° pays le plus démocratique d’Afrique en 2022 », déclare-t-il. Le Chef de l’Etat malgache de souligne que la décision prise par l’Etat vise à garantir l’ordre public en évitant les débordements en cette période préélectorale. « Il est désolant de mettre sur le même plan des meetings organisés par un parti politique et des réunions publiques tenues par un gouvernement dans l’exercice du pouvoir. Je veux souligner que, contrairement à d’autres pays de la région, il y a une vraie liberté d’expression à Madagascar: l’opposition peut s’exprimer et ne se prive pas de le faire quotidiennement dans les différents médias du pays », ajoute le Président de la République.

Relations extérieures

Concernant la position de Madagascar par rapport au conflit russo-ukrainien, le Président malgache a indiqué que Madagascar veut continuer à travailler avec tous les pays, y compris la Russie. Mais cela ne veut pas dire que le pays prend position en faveur des uns ou des autres. “Nous voulons nous concentrer sur les besoins de notre population, sans que d’autres pays apportent des problèmes chez nous. Nous avons déjà suffisamment de soucis pour nous développer. Nous voulons rester neutres. Nous ne sommes pas responsables de cette guerre, même si nous n’y sommes pas insensible“, souligne-t-il.

Toujours en matière de politique étrangère, le Président Rajoelina affirme que le pays a besoin d’un partenariat, mais ne ne veut pas que l’on lui dicte quoi faire. “L’Afrique ne veut pas recevoir de leçons des pays occidentaux, donc il faut changer d’approche. Que cela concerne nos politiques ou les votes aux Nations unies, il y a parfois des pressions sur les décisions prises. Mais il faut prendre en considération notre voix. C’est un point important à améliorer dans nos relations“, déclare le Chef de l’Etat malgache.