1.300.000 enfants à Madagascar ne sont pas inscrits dans le préscolaire
Le tout premier rapport mondial de l’UNICEF sur l’éducation préscolaire révèle que la majorité des gouvernements dans le monde n’investissent pas suffisamment dans l’enseignement préscolaire.
A Madagascar, plus de 1.300.000 enfants, soit près de 60 % d’enfants d’âge préscolaire, ne sont pas inscrits dans l’éducation préscolaire publics ou privé. À l’échelle mondiale, ils sont 175 millions, signale l’UNICEF dans un rapport publié aujourd’hui dans le monde.
Les pays qui comptent un grand nombre d’enfants non-inscrits dans l’éducation préscolaire passent à côté d’une occasion cruciale d’investir dans le capital humain et risquent de créer très tôt de profondes inégalités, remarque en outre ce rapport. Dans les pays à faible revenu, seul un jeune enfant sur cinq est inscrit dans un établissement d’enseignement préscolaire.
« L’éducation préscolaire pose les bases de l’éducation de nos enfants et joue ensuite un rôle déterminant à chaque étape de leur scolarisation », affirme Michel Saint-Lot, Représentant de l’UNICEF. « Pourtant, trop d’enfants dans le monde en sont privés. Cette situation les expose à un risque accru de redoublement ou de décrochage scolaire et les condamne à vivre dans l’ombre de leurs pairs mieux lotis. »
Dans son tout premier rapport sur l’éducation préscolaire, intitulé Un monde prêt à apprendre : Accorder la priorité à une éducation préscolaire de qualité, l’UNICEF révèle que les enfants qui suivent au moins une année d’éducation préscolaire ont plus de chances de développer les compétences essentielles dont ils ont besoin pour réussir à l’école, sont moins susceptibles de redoubler ou d’abandonner l’école, et sont donc plus à même de contribuer à l’édification de sociétés et d’économies pacifiques et prospères une fois adultes.
Les enfants inscrits dans un établissement d’enseignement préscolaire ont au moins deux fois plus de chances de savoir lire, écrire et compter plus tôt que les enfants qui n’ont pas bénéficié d’un apprentissage préscolaire. Dans les pays où davantage d’enfants suivent des programmes d’éducation préscolaire, un nombre nettement plus élevé d’enfants termine l’enseignement primaire et acquiert les compétences minimums requises en lecture et en mathématiques avant la fin du primaire.
L’UNICEF Madagascar soutient le développement du cycle préscolaire depuis plus que 10 ans. Pendant ce temps, l’éducation préscolaire à Madagascar a connu une expansion importante due à l’augmentation annuelle de l’offre publique et de centres d’activité préscolaire publics et communautaires, de 195 en 2006-2007 à 15 132 en 2017-2018. Le niveau du taux de préscolarisation des enfants de 3 à 5 ans dans le public est passé de 7,5% en 2004-2005 à 30% en 2017-2018, avec des indices de parité légèrement en faveur des filles.
Même si l’éducation préscolaire a connu une expansion importante à Madagascar au cours des dernieres années, seulement 30% des enfants âgés de 3-5 ans sont inscrits dans les écoles préscolaires publiques, et il existe une très grande disparité entre les régions. A Amoron’I Mania, par exemple, 30% d’enfants âgés de 3 à 5 ans sont préscolarisés contre 3% pour la région SAVA.
Niveau d’éducation des mères
Ce rapport indique en outre que le revenu des ménages, le niveau d’éducation des mères et la situation géographique jouent un rôle déterminant dans la participation à l’éducation préscolaire à travers le monde. La pauvreté reste toutefois le facteur le plus décisif. Les principales conclusions du rapport mettent notamment en évidence :
- Le rôle de la pauvreté : Dans 64 pays, les enfants les plus démunis ont sept fois moins de chances de participer à des programmes d’éducation préscolaire que les enfants issus des familles les plus aisées. Dans certains pays, la fracture entre les riches et les pauvres est encore plus évidente.
- L’incidence des conflits : Dans 33 pays touchés par un conflit ou une catastrophe, plus des deux tiers des enfants d’âge préscolaire ne sont pas inscrits dans un programme d’éducation préscolaire, alors que ce sont ceux qui en ont le plus de bénéfices à tirer. En effet, l’éducation préscolaire aide les jeunes enfants touchés par des crises à surmonter les traumatismes qu’ils ont subis en leur donnant un cadre, un lieu sûr où apprendre et jouer, ainsi qu’un exutoire à leurs émotions. A Madagascar, UNICEF distribue des kits préscolaires parmi ses réponses aux urgences pour assurer les bien-être de jeunes enfants.
- Le cycle de la réussite scolaire : Dans les pays où les données sont disponibles, les enfants dont la mère a terminé au moins l’enseignement secondaire ont près de cinq fois plus de chances de participer à un programme d’éducation préscolaire que les enfants dont la mère n’a pas continué au-delà du primaire ou ne dispose d’aucune éducation formelle.
En 2017, en moyenne, seuls 6,6 % des budgets nationaux consacrés à l’éducation dans le monde étaient affectés à l’éducation préscolaire et près de 40 % des pays disposant de données à ce sujet allouaient moins de 2 % de leur budget à ce sous-secteur. A Madagascar, 6 % du budget de l’éducation national est alloué à l’enseignement préscolaire qui est trois fois plus élevé que la moyenne au niveau régional.
Toutefois, le pays manque d’éducateurs formés. L’UNICEF Madagascar a contribué à la formation de près de 1 éducateur sur 3 dans les régions d’Anosy, Androy, Atsimo Atsinanana, Vatovavy Fitovinany, Boeny et Analanjirofo, qui représente plus que 17 % de tous les éducateurs dans le pays. Mais très peu d’entre les autres ont bénéficié d’une formation pédagogique.
422 000 éducateurs sous-payés
Ce manque d’investissement dans l’éducation préscolaire à travers le monde a des retombées négatives sur la qualité des services proposés et entraîne notamment une pénurie d’éducateurs qualifiés dans le préscolaire. Dans l’ensemble, les pays à revenu faible et intermédiaire recensent plus de 60 % d’enfants d’âge préscolaire dans le monde, cependant, on compte à peine 32 % d’éducateurs préscolaire dans le monde. De fait, seulement 422 000 éducateurs du préscolaire sont actuellement en poste dans des pays à faible revenu. Au vu de la croissance démographique et sachant qu’il faudrait, dans l’idéal, un éducateur pour 20 élèves, le monde aura besoin de 9,3 millions d’éducateurs du préscolaire supplémentaires pour atteindre les cibles au niveau mondial en matière d’éducation préscolaire d’ici à 2030. A Madagascar, en moyenne, il y a 1 éducateur pour 23 élèves dans les centres préscolaires publics et privés.
« Si les gouvernements actuels veulent former une main-d’œuvre compétitive pour l’économie de demain, ils doivent s’attacher en premier lieu à développer l’éducation préscolaire », affirme le représentant de l’UNICEF. « Si nous voulons donner à nos enfants la meilleure chance de réussir leur vie dans une économie mondialisée, les dirigeants doivent impérativement axer leurs efforts sur l’éducation préscolaire et y affecter les ressources nécessaires. »
L’UNICEF exhorte les gouvernements à mettre en place au moins une année d’éducation préscolaire de qualité et à en faire une composante obligatoire de l’éducation, en particulier des enfants les plus vulnérables et des enfants marginalisés. Pour inscrire cet objectif dans la réalité, l’UNICEF les exhorte en outre à affecter au moins 10 % du budget de l’éducation au développement de l’éducation préscolaire et à investir dans la formation des éducateurs, l’établissement de normes de qualité et la mise en place d’un accès plus large et plus équitable.