Madagascar face au défi des carences en micronutriments

4 Jul 2025

À Madagascar, la malnutrition ne se manifeste pas uniquement par l’insuffisance pondérale ou les retards de croissance. Une nouvelle réalité, plus discrète mais tout aussi inquiétante, vient d’être révélée : celle des carences en micronutriments, ces vitamines et minéraux essentiels au bon développement des individus. L’Enquête Nationale sur les Carences en Micronutriments (ENCM), menée pour la première fois à l’échelle nationale en 2024, met en lumière l’ampleur du problème dans les 23 régions du pays. Le rapport final a été publié hier.

Portée par le gouvernement malgache, avec le soutien de partenaires tels que l’UNICEF, le Programme alimentaire mondial, la GIZ, la Banque mondiale et l’USAID, cette étude marque un tournant dans la compréhension des enjeux nutritionnels. Elle révèle que les enfants de moins de cinq ans, les adolescents, les femmes en âge de procréer et les femmes enceintes sont particulièrement touchés.

Chez les jeunes enfants, les chiffres sont sans appel : plus de 4 sur 10 souffrent d’anémie, un quart présente une carence en fer, et 75 % manquent de riboflavine (vitamine B2). Le déficit en calcium est quasi-généralisé, atteignant 95 % dans cette tranche d’âge. Les adolescents et les femmes ne sont pas épargnés. Les carences en fer, zinc, vitamines A, B1, B2, B12, ou encore en iode, affectent une large partie de la population féminine, avec des répercussions sur la santé reproductive et le développement cognitif.

L’étude met également en évidence des habitudes alimentaires déséquilibrées : diversité très limitée des repas, faible consommation de légumes et de fruits, aliments ultra-transformés en hausse. Si 80 % des foyers utilisent du sel iodé, moins de la moitié consomment un sel réellement adéquat, et le sel fluoré reste totalement absent. Ces déséquilibres sont accentués par une insécurité alimentaire qui touche près de 8 ménages sur 10.

Au-delà du constat, l’ENCM apporte des leviers d’action. Ses résultats permettront de renforcer les politiques de supplémentation en fer ou en vitamine A, de mieux cibler les campagnes de fortification alimentaire, et d’améliorer les protocoles de soins. Cette base de données inédite constitue un outil de pilotage pour les autorités sanitaires et les partenaires techniques engagés dans la lutte contre la malnutrition.

Avec cette enquête, Madagascar dispose désormais d’un tableau précis et actualisé des carences qui freinent son développement humain. Un pas décisif pour transformer les constats en actions concrètes, à condition que les recommandations formulées soient suivies d’investissements coordonnés et durables.

Mika Ramionona